Caverne sculptée de Dénezé-sous-Doué - ©Membre anonyme Communes.com

Les mystérieuses statues de Dénezé-sous-Doué

La France fourmille de lieux insolites et mystérieux qui n’ont jamais révélé tous leurs secrets et qui font l’objet de nombreux débats entre historiens.
Dans l’ancienne province de l’Anjou, à quelques kilomètres de la ville de Saumur, les caves dites de Mousseaux situées à Dénezé-sous-Doué font partie de ces endroits envoûtants qui laissent libre cours à l’imagination.

Imaginez des salles souterraines entièrement sculptées, des visages parfois grotesques, parfois réalistes, des scènes religieuses ou libertines gravées dans la pierre au 16ème siècle et oubliées jusque dans les années 1950.

Qui sont les auteurs de cette statuaire unique en son genre ? Plusieurs thèses sont avancées mais aucune d’entre elles n’a été confirmée à l’heure actuelle.

Un peu d’histoire

La fondation du Comté d’Anjou

Le Comté d’Anjou est fondé au 10ème siècle sur des terres octroyées à Ingelger par le roi de Francie occidentale en récompense de la bravoure et de la fidélité à la couronne dont il a fait preuve durant les raids normands.
Le fils d’Ingelger devient le premier Comte d’Anjou, en 929.
Très vite cette principauté s’agrandit et s’enrichit au détriment de ses voisins, principalement les Comtes de Blois.

L’Empire Plantagenêt

La puissance de la famille d’Anjou est encore augmentée lorsque le fils de Foulques V d’Anjou, Geoffroy Plantagenêt, devient l’époux de Mathilde l’Emperesse, la petite-fille de Guillaume-le-Conquérant et l’unique héritière de Henri 1er d’Angleterre.
Spoliée du trône anglais et du Duché de Normandie, Mathilde soutenue par son mari parvient à récupérer l’un et l’autre, constituant ainsi la base du futur empire Plantagenêt qui, à son apogée, s’étend de l’Écosse aux Pyrénées.

Après le décès de Richard-Coeur-de-Lion, le roi de France Philippe IV le Bel reprend par la force une grande partie des possessions anglaises situées sur le continent, dont l’Anjou.
La région devient dès lors un apanage confié aux fils cadets de la dynastie des rois de France. L’Anjou obtient le statut de duché vers le milieu du 14ème siècle.

La Guerre de Cent Ans

Durant la Guerre de Cent Ans qui oppose la France et l’Angleterre, l’Anjou est le théâtre de nombreuses batailles sanglantes mais doit également affronter les grandes épidémies et les pillages organisés par des bandes de brigands. Le pays traverse une longue période sombre et lorsque l’Anjou redevient définitivement français en 1453, il faut faire encore face à la pauvreté. Les champs n’ont plus été cultivés par les paysans qui ont préféré se réfugier dans les villes fortifiées et la famine s’est installée.

René 1er d’Anjou

Heureusement, au 15ème siècle, René 1er d’Anjou surnommé le « Bon Roi René » redresse la situation économique et l’Anjou connaît à nouveau le calme et l’opulence grâce au développement du commerce et de l’industrie textile. Angers est alors considérée comme un centre culturel rayonnant. Les héritiers de René décèdent avant lui et le roi de France l’oblige à lui céder ses terres en 1474.

Les guerres de religion

Le 16ème siècle est marqué par les guerres de religion qui vont plonger la France dans le chaos.
A cette époque, l’Église catholique traverse une période difficile et est l’objet de critiques concernant la vie de débauche menée par certains membres du clergé et le manque de fermeté du pape. La vente des indulgences pour diminuer les années de purgatoire, les persécutions souvent suivies d’exécutions sans procès des sorcières, la multiplication des reliques entament la confiance des fidèles qui se détournent d’une religion où le matériel a pris le dessus sur le spirituel.

C’est donc tout naturellement que des humanistes partent à la recherche d’idées nouvelles et que l’Église perd une partie de son pouvoir.
Les souverains et la noblesse voient en effet d’un mauvais œil la richesse de cette Église qui détient un quart des terres cultivables et qui tire profit des taxes levées par le Haut-clergé.
En ce début de siècle, deux théologiens, l’Allemand Martin Luther et le Suisse Jean Calvin, répandent une nouvelle doctrine prônant le retour aux préceptes fondamentaux du christianisme. Ils se basent sur l’étude de la Bible originelle qui est largement diffusée grâce à une toute nouvelle invention, l’imprimerie.

La Réforme voit son nombre d’adeptes augmenter rapidement et de nombreux foyers protestants s’installent en Anjou.
Cette prise d’importance inquiète l’Église catholique qui s’oppose aux idées luthériennes dès 1520.
Excommunié par le pape, mis au ban par Charles-Quint, interdit de publication et d’écriture, Luther poursuit malgré tout sa lutte et refuse de renier ses principes.
Ceux-ci servent de prétexte aux classes sociales défavorisées pour se révolter contre l’autorité bien que Luther réprouve ce mouvement social.
En 1545, le pape Paul III convoque un concile œcuménique, le « Concile de Trente » qui va durer 18 années. La plupart des idées défendues par Luther sont rejetées et l’autorité absolue du pape est confirmée. Différentes mesures sont cependant adoptées afin de mieux contrôler les membres du clergé. Des séminaires sont également fondés pour améliorer leur formation.

Ce concile est en réalité une véritable arme contre la réforme protestante, il marque le début des guerres de religion et la naissance de la « Contre-Réforme ».
Parallèlement, la compagnie de Jésus fondée en 1539 par Ignace de Loyola se met au service du pape et du catholicisme par le biais de l’enseignement.

Les caves de Dénezé-sous-Doué

C’est dans ce contexte de guerres de religion que des artistes anonymes commencent à orner les parois de caves situées sur le territoire de Denezé-sous-Doué.
Plus de 300 statues sont gravées dans la pierre, à l’abri des regards pour une raison inconnue. Le souterrain aurait une première fois été découvert par un prêtre du 17ème siècle. Il est probable que celui-ci choqué par certaines figures l’ait fait combler.

Il faut attendre l’année 1956 pour que quelques enfants du village redécouvrent par hasard l’entrée de ce lieu énigmatique.
Le souterrain est vidé et ses statues sont répertoriées sans qu’aucune explication ne puisse être avancée.
Sculptées dans le tuffeau qui abonde dans les Pays-de-la-Loire, elles sont aujourd’hui menacées par l’érosion et par des moisissures qui attaquent la pierre tendre. Il est d’ailleurs envisagé de combler à nouveau la cave afin de préserver cette œuvre unique en son genre.
Il est également possible que d’autres statues se trouvent dans des salles contiguës non encore déblayées.

Les statues

Les statues des caves de Mousseaux présentent des traits, des styles et des degrés de finesse très différents ce qui laissent supposer que les auteurs de ces œuvres étaient nombreux et n’étaient vraisemblablement pas des artistes. En effet, on relève bon nombre de défauts de proportion et les traits sont relativement grossiers. On est loin des merveilleuses sculptures que nous a offert la Renaissance.
Alors s’il ne s’agit pas d’un véritable chef d’œuvre, à quoi pouvait servir cette statuaire ?

Tout d’abord, leur étude a permis de déterminer la date probable de la création qui se situerait entre les années 1560 et 1580. Cette datation repose sur les habits et les différents objets qui appartiennent tous à cette période. Aucune représentation d’objet ou de vêtement postérieurs au 16ème siècle n’a été relevée.
Les personnages parfois à peine ébauchés et d’autres fois bien détaillés sont souvent mis en scène dans la vie quotidienne ou dans des processions religieuses. Des personnages comme Henri II de France, Catherine de Médicis ou Diane de Poitiers sont reconnaissables mais même ces personnalités ne sont pas à leur avantage.
Les scènes tour à tour cocasses, ridicules, religieuses voire érotiques touchent les « trois ordres » établis à savoir la noblesse, le clergé et le tiers-état.

En réalité, les statues évoquent plus une satire de la société qu’une œuvre conçue par un ou plusieurs sculpteurs.

Les interprétations

Si faire le relevé des statues de Dénezé a été relativement facile, il n’en est pas de même de leur interprétation. En effet, cette œuvre ne ressemble à aucune autre et il n’y a donc aucun point de comparaison qui permettrait d’avancer une explication plausible.

Quelques historiens avancent cependant des hypothèses :

  • L’œuvre pourrait avoir été créée par des protestants qui sont, rappelons-le, en guerre avec les catholiques. En effet, dans la région toute proche, la ville de Saumur, fief important du protestantisme, est en lutte avec les Ducs de Guise fervents défenseurs du catholicisme.
    Suite à l’interdiction du culte protestant une véritable rébellion s’est soulevée en Anjou.
    Des protestants ont notamment édité un pamphlet intitulé « Le réveille-matin des François et de leurs voisins ». https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8626324d/

Il est donc possible que les statues de Dénezé représentent également un moyen de dénoncer les atrocités commises contre les Huguenots.

  • Durant le Moyen-Âge, un genre théâtral fait fureur, les « Mystères ». Ils abordent des thèmes religieux et principalement la « Passion du Christ ». A l’origine, les Mystères sont en réalité des saynètes réalisées avec des figurines en bois ou en plâtre. Celles-ci sont ensuite remplacées par des « acteurs » choisis parmi les membres du clergé ou parmi les fidèles. Petit à petit, les Mystères sont parsemés de scènes amorales, grossières voire lubriques, bien éloignées de leur vocation première. Les acteurs ne sont désormais plus rattachés à l’Église et les tableaux deviennent un véritable spectacle profane. A la même époque, des pièces de théâtre appelées « diableries » parodient les mystères.
    François Rabelais décrit les « diables » dans son « Quart Livre ». Bruyants, ils parlent de manière injurieuse et n’hésitent pas à médire des Chrétiens, de la Vierge ou des Saints pour le plus grand bonheur des spectateurs. Il n’est donc pas étonnant que le Parlement de Paris prend la décision de faire interdire ces représentations le 18 novembre 1548.
    Rabelais mentionnent également des représentations de diableries dans les « jeux de Doué » qui ont effectivement lieu dans les arènes de Doué-la-Fontaine, non loin de Denezé-sous-Doué et à la même époque que la réalisation des sculptures.
    De là à rapprocher les pièces de théâtre des statues, il n’y a qu’un pas. Les caves auraient elles pu servir de décor pour des représentations interdites voire des messes noires ou même des sacrifices ? Personne ne peut le confirmer ou l’infirmer.

Quoiqu’il en soit, une chose est certaine c’est que les sculpteurs de Dénezé ont du garder leur secret afin d’échapper à une condamnation certaine.
En effet, depuis 1539, l’ « Ordonnance de Villers-Cotterêts », un texte de loi édicté par le roi François 1er, interdisait notamment tout rassemblement d’artisans ou de compagnons.

La visite

La cave aux sculptures de Dénezé est ouverte au public :

  • tous les jours de 14 à 18 hr sauf les mardis en avril et mai
  • tous les jours de 10hr30 à 13hr et de 14 à 18 hr sauf le mardi de juin à août
  • les vendredis, samedis et dimanches de 14 à 18 hr n septembre

La visite dure approximativement 45 minutes.

La cave aux sculptures
Rue de la Caverne
49700 Dénezé-sous-Doué
Mail : lacaveauxsculptures@gmail.com
Site web : https://www.ot-saumur.fr/LA-CAVE-AUX-SCULPTURES_a811.html

Découvrir la région

Dénezé-sous-Doué est situé au cœur du Pays saumurois, une région riche en patrimoine naturel et historique. Durant votre séjour, ne manquez pas de visiter notamment :

Le village troglodytique de Louresse-Rochemenier

Le village de Louresse-Rochemenier et son musée Trogloqui permet de découvrir notamment deux anciennes fermes et une chapelle du 13è me siècle et de mieux comprendre le quotidien des habitants des maisons souterraines.
Cet espace est ouvert février à novembre:

  • tous les jours de 9hr30 à 18 hr de mai à mi-septembre
  • tous les jours sauf les lundis et les 1ers dimanches du mois de 10 à 17 hr de mi-septembre à novembre et de février à avril

La visite dure approximativement 2 heures et se fait librement ou accompagnée d’un guide.
Il est recommandé de se munir d’un vêtement chaud en raison de la fraîcheur permanente qui règne dans les souterrains.
Le site est accessible aux personnes à mobilité réduite accompagnées (rampe d’accès de 20% et irrégularité du sol). Toutefois, certaines cavités ne sont accessibles que par escalier.

Musée Troglo
14 rue du Musée
49700 Louresse-Rochemenier
Tel : 02 41 59 18 15
Mail : visite@troglodyte.fr
Site web : http://www.troglodyte.fr

Le Bioparc de Doué-la-Fontaine

Le Bioparc de Doué-la-Fontaine abrite plus de 1.200 animaux sur le site d’anciennes carrières de pierre coquillière, une roche sédimentaire riche en fossiles. Il participe activement à des programmes de sauvegarde d’espèces menacées et à différents projets environnementaux.

Le parc est ouvert tous les jours de mi-février au 11 novembre :

  • de 10 à 18 hr en février et mars
  • de 9 à 19 hr en avril, mai, juin et septembre
  • de 9 à 19hr30 en juillet et août
  • de 10 à 18hr30 en octobre et novembre
    La visite dure minimum 4 heures
    Le zoo est accessible aux personnes à mobilité réduite et aux poussettes d’enfant. Prêt de fauteuils roulants et poussettes sur demande et tablettes en écriture braille pour découvrir les empreintes.

Bioparc
103 rue de Cholet
49700 Doué-en-Anjou (Doué-la-Fontaine)
Tel : 02 41 59 18 58
Mail : infos@bioparc-zoo.fr
Site web : http://www.bioparc-zoo.fr

Saumur

La ville de Saumur est une ville d’art et d’histoire renommée notamment pour son château, son école de cavalerie et bien entendu pour ses vins :

Le château de Saumur bâti entre le 10ème et le 16ème siècle au point de confluence de la Loire et du Thouet abrite d’importantes collections dont de très belles céramiques, des tapisseries du 15ème au 18ème siècle et des pièces retraçant l’évolution du harnachement de cheval à travers les siècles et les continents.

Château de Saumur
49400 Saumur
Tel : 02 41 40 24 40
Mail : chateau.musee@ville-saumur.fr
Site web : http://www.chateau-saumur.fr

Le Cadre Noir de Saumur est chargé de former le corps enseignant de l’École Nationale d’Équitation Une partie des installations (le Grand Manège, les écuries et la sellerie) est accessible au public. Plusieurs formules de visite (entre 1 et 2 heures) ainsi que des présentations équestres et des spectacles sont proposés aux visiteurs.

École nationale d’équitation
Avenue de l’École nationale d’équitation
49400 Saint-Hilaire-Saint-Florent
Mail : visites.cadrenoir@ifce.fr
Site web : https://www.ifce.fr/cadre-noir/

Cette découverte peut être complétée par la visite du musée de la Cavalerie de Saumur installé dans les anciennes écuries du Cadre noir. Le site est accessible aux personnes à mobilité réduite

Musée de la Cavalerie de Saumur
Place Charles de Foucauld
49400 Saumur
Tel : 02 41 83 69 23
Mail : associationsaintgeorges49@gmail.com
Site web : http://www.musee-cavalerie.fr

Que manger dans la région ?

La région de Saumur est bien entendu célèbre pour ses vins effervescents et ses vins de Loire. Ils accompagnent parfaitement les spécialités culinaires de la région :

  • l’alose farcie à l’oseille (ou le sandre)
  • l’asperge d’Anjou
  • la fouée, un petit pain servi chaud avec du fromage, des champignons ou des rillettes
  • la galette de Doué-la-Fontaine, un gâteau à pâte sablée à manger nature ou accompagné d’une crème anglaise
  • la poularde angevine, une fricassée de volaille aux champignons et oignons grelots cuite dans du vin d’Anjou
  • le rillon ou rillaud préparé avec de la poitrine de porc cuite dans du saindoux
  • le saumon de Loire grillé, au beurre blanc ou à l’oseille
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