Maison forte de Reignac à Tursac en Dordogne - ©Eric Coll via Communes.com

Les secrets de Reignac

Il existe des lieux entourés de mystères, des anciennes demeures qui ont vécu des pages sombres, parfois sanglantes, et qui au fil des siècles ont gardé des secrets enfouis dans la mémoire des hommes.
Les vieilles pierres de ces châteaux, abbayes ou manoirs pourraient nous conter bien des complots, intrigues ou meurtres qui ont eu lieu entre leurs murs.
En visitant ces endroits marqués par la tragédie, nous ressentons parfois tout le poids des drames qui s’y sont déroulés.

De passage en Dordogne, prenez le temps de vous arrêter dans la petite commune de Tursac et de visiter la Maison Forte de Reignac, un étrange bâtiment troglodytique qui vous étonnera par son architecture et surtout par l’histoire du très peu recommandable « Bouc de Reignac ».

Un peu d’histoire

La préhistoire dans la Vallée de la Vézère

La Dordogne a été habitée dès le Paléolithique et de nombreux sites archéologiques attestent de cette occupation, notamment dans la vallée de la Vézère, en Périgord noir. Le département recèle d’extraordinaires grottes ornées de peintures et de gravures pariétales.

C’est dans cette vallée que se situent notamment les Eyzies-de-Tayac-Sireuil, une commune considérée comme la « Capitale mondiale de la Préhistoire » et la grotte de Lascaux baptisée la « Chapelle Sixtine de l’art pariétal ».
Au total, on y recense près de 150 sites préhistoriques dont 25 grottes ou abris sous roche ornés de peintures rupestres ce qui représente la plus forte concentration d’habitats paléolithiques du monde.

Il n’est donc pas étonnant que la commune de Tursac abrite l’un de ces lieux emblématiques, l’abri sous roche de la Madeleine. Ce site mis au jour dans les années 1860 a par ailleurs donné son nom à la dernière phase du Paléolithique supérieur, le « Magdalénien », qui s’étend de 17.000 à 12.000 avant l’Ère commune.
A cette époque, nos lointains ancêtres produisent une importante industrie lithique et utilisent des grattoirs, lames, perçoirs et burins. Ils travaillent également d’autres matières comme l’os, les coquillages et le bois. L’art se généralise et les objets utilisés au quotidien portent dorénavant des décors figuratifs ou géométriques, à l’instar des parois des cavernes.

Les Celtes et les Romains

Au cours du 1er millénaire avant JC, des peuples celtes appartenant aux civilisations de Hallstatt (Autriche) et de La Tène (Suisse) migrent vers l’ouest et s’installent dans l’ensemble des régions de la France actuelle.
C’est ainsi que les Pétrocores (ou Pétrocoriens) qui donneront leur nom au Périgord, occupent un vaste territoire compris entre la Dordogne et la Vézère. Lorsque Jules César part à la conquête de la Gaule, cette tribu participe à la révolte orchestrée par le chef arverne Vercingétorix.

Les Romains occupent la région en 52 avant JC et ses habitants profitent de la « Pax romana ». La Dordogne est intégrée à la province Gaule aquitaine et se développe notamment grâce au commerce du vin et de la céramique tandis que plusieurs cités importantes sont fondées dont Périgueux (Vesunna) ou Angoulême (Iculisma).

Le Moyen-Âge

Lorsque les peuples germaniques profitent du déclin de l’empire romain affaibli par les luttes de pouvoir pour envahir la Gaule au 5ème siècle, les Wisigoths s’installent au sud de la Loire tandis que les Francs occupent le territoire situé au nord du fleuve.
Au siècle suivant, Clovis, un roi franc franchit la Loire à la tête de son armée et repousse les Wisigoths au-delà des Pyrénées. Seule la Septimanie correspondant à l’actuel Languedoc reste wisigothe jusqu’au 8ème siècle.

En 1066, Guillaume-le-Conquérant, duc de Normandie, envahit l’Angleterre et s’empare de la couronne britannique après la « Bataille de Hastings ». Ces événements ne sont en réalité que le prélude à une guerre qui va s’éterniser pendant plusieurs siècles entre la France et l’Angleterre.

Le petit-fils de Guillaume-le-Conquérant et fils de Geoffroy V d’Anjou dit Plantagenêt, Henri II hérite d’un immense territoire qu’il agrandit encore en épousant Aliénor d’Aquitaine. Il règne dorénavant sur l’empire Plantagenêt qui s’étend de l’Écosse aux Pyrénées.
A la mort sans héritier du fils de Henri II, Richard Coeur-de-Lion, le roi de France Philippe II Auguste entreprend de reprendre les terres anglaises situées sur le continent à son frère Jean sans Terre.
Seul le Duché d’Aquitaine fortement amputé reste propriété de l’Angleterre après la « Bataille de Bouvines ».
Rebaptisé « Duché de Guyenne » en 1229, il appartient aux Plantagenêt jusqu’en 1453 et vit des moments difficiles marqués par les guerres de Guyenne (1294 – 1303) et de Cent Ans (1337 – 1453) .

En 1356, le roi de France Jean II le Bon est fait prisonnier et les deux pays signent, quatre ans plus tard, le « Traité de Brétigny ». Le roi est libéré contre la promesse du versement d’une rançon (qui ne sera jamais payée en totalité) et de la cession de plusieurs territoires dont le Périgord. Édouard III d’Angleterre renonce en revanche au trône français. Ce traité permet de conclure une trêve de neuf ans dans la guerre de Cent Ans.

Le château-falaise de Reignac

Pendant toute la période allant de la préhistoire au Moyen-Âge, de nombreux habitants de la Vallée de la Vézère continuent à vivre dans des habitats troglodytiques faciles à défendre et qui leur offrent une sécurité accrue.
A l’origine, les hommes se contentent de squatter des grottes voire de simples abris mais, au fil du temps, ils aménagent de véritables villages creusés dans les parois rocheuses.
C’est ainsi que naissent des demeures seigneuriales ou des forteresses creusées à même la pierre. Ces « châteaux-falaises» se caractérisent par leurs façades qui semblent s’appuyer contre les rochers.

La Maison forte de Reignac située à un jet de pierre des grottes des Eyzies et de Lascaux est le dernier château-falaise encore debout.
La façade a été érigée en 1386 sur l’emplacement d’un site préhistorique occupé 20.000 ans auparavant.
Ce château édifié à des fins défensives est doté d’un imposant système de fortifications combinant meurtrières, avant-corps en encorbellement (ou bretèches) et, plus tard, ouvertures destinées à accueillir des canons appelés alors « bouches à feu ». Les fenêtres ne sont cependant pas d’origine et leur percement n’intervient qu’au 16ème siècle.

Des terrasses sont également aménagées dans la partie supérieure de la falaise afin de surveiller la vallée et de permettre aux habitants de se mettre à l’abri et de défendre le château en cas d’attaque. Des bandes organisées vivent en effet du brigandage et n’hésitent pas à piller les châteaux de la région.

A l’époque de la construction de la façade de la maison forte, la famille de Reignac est vassale du seigneur de la Roque Saint-Christophe, une cité considérée comme le plus vaste complexe troglodytique d’Europe.
Les Reignac profitent de nombreux privilèges et peuvent notamment rendre justice pour des faits mineurs qui se déroulent sur les terres du domaine.

Jaquemet, le Bouc de Reignac

Jaquemet, fils adoptif du seigneur de Reignac et fruit d’un viol commis par un membre du clergé devient écuyer aux écuries de Montignac et participe aux croisades en Terre Sainte
Lorsque son père décède, il revient en Dordogne afin de s’occuper de ses terres et, très vite, la région connaît une série d’événements dramatiques.
En effet, Jaquemet aigri notamment par plusieurs années passées au fond d’une prison en terre musulmane se révèle être un homme cruel, usant et abusant de son pouvoir sur les personnes qui ont le malheur d’habiter sur son domaine.

Son passe-temps favori est de torturer et de tuer sans avoir besoin de prétexte. Il sème la terreur dans toute la région.
Cette peur est d’autant plus grande parmi la population féminine car celui qui est surnommé le « Bouc de Reignac » se plaît à capturer des jeunes filles afin d’exercer le droit de cuissage qui lui permet de les déflorer en toute impunité. Cette pratique avait été abandonnée par les seigneurs depuis plusieurs générations.
Pour les amener dans sa demeure, il fait chevaliers de simples brigands qui sont chargés de capturer les jeunes filles des alentours. Celles-ci sont ensuite enfermées dans une chambre ou plutôt une cellule où elles subissent violences sexuelles, tortures et sont généralement mises à mort.
De même, les chevaliers deviennent les instruments de sa justice et se chargent d’assurer les fonctions de juges et de bourreaux. Ce système permet au seigneur de Reignac de poursuivre ses monstrueuses activités sans être inquiété.

Le nombre croissant de disparitions dans une région réputée calme inquiète malgré tout les autorités de Sarlat. Les soupçons ne se portent cependant pas sur la personne du seigneur de Reignac et celui-ci est même sollicité afin d’enquêter dans le voisinage.

Bien entendu, Jaquemet ne montre aucun empressement à enquêter sur ces étranges affaires dont il est lui-même l’auteur. C’est ce manque de diligence qui donne l’alerte et le seigneur devient principal suspect. Traqué, il s’enfuit en Sicile non sans avoir tué un proche de l’évêque de Périgueux, dernière vengeance d’un enfant élevé dans la haine de l’Église ?

Léopold de Bonaventure dit l’Alchimiste

Jaquemet n’est pas le seul excentrique à avoir habité la maison forte. Un alchimiste du nom de Léopold de Bonaventure aurait en effet pratiqué son art dans une salle ouvrant sur la terrasse supérieure. Il aurait en effet cherché à fabriquer un élixir de jeunesse éternelle.
On ne s’étonne pas qu’il s’adonnait à ses passions, bien caché dans la demeure troglodytique car elles auraient pu le mener tout droit au bûcher pour sorcellerie.

La visite

Visiter la Maison Forte de Reignac réserve un grand nombre de surprises. Le voyageur est tout d’abord étonné de découvrir les volumes et le nombre de pièces de la demeure médiévale.
En effet, en regardant la façade, rien ne laisse soupçonner que celle-ci s’étend profondément dans la falaise.
De plus, les salles sont soigneusement meublées et décorées ce qui donne l’impression de plonger au cœur du 16ème siècle et on s’attend à voir à tout moment apparaître les seigneurs des lieux et leurs serviteurs pour reprendre leurs activités un instant suspendues.

De nombreux visiteurs, probablement plus sensibles à l’ambiance de ce lieu qui a vécu des heures sanglantes, ont une impression d’oppression en arpentant le château. Des phénomènes étranges auraient même été observés et enregistrés par des équipes de scientifiques.

Même si vous êtes totalement hermétique au paranormal, la visite de la Maison Forte de Reignac ne vous laissera pas indifférent et vous ressortirez en ayant pu, au minimum, mieux comprendre la vie quotidienne d’une forteresse médiévale.

En pratique

La visite de la Maison Forte de Reignac est libre et dure en moyenne 1 à 2 heures selon vos envies d’une découverte plus ou moins détaillée.
On y découvre non seulement le mobilier d’époque mais également les cachots lugubres, la chapelle, les terrasses, le refuge de l’Alchimiste et une salle consacrée à une exposition permanente sur la torture au Moyen-Âge.

Le site est ouvert tous les jours entre les vacances de février et la fin novembre ainsi que pendant les vacances de Noël :

  • de 10 à 18 hr durant les vacances de février et de Noël, en mars, en octobre et en novembre
  • de 10 à 19 hr d’avril à juin et en septembre
  • de 10 à 20 hr en juillet et en août

Il est conseillé d’acheter le « PassvisitPérigord » qui permet de découvrir 12 sites de la région à tarif réduit pendant une année. L’économie réalisée à chaque visite est de l’ordre des 20%.

Maison Forte de Reignac
24620 Tursac
Tel : 05 53 50 69 54
Mail : info@maison-forte-reignac.com
Site web : http://www.maison-forte-reignac.com

Découvrir la région

Profitez de vos vacances en Dordogne pour visiter également :

Que manger dans la région ?

La Dordogne est l’une des grandes régions gastronomiques françaises. On peut y savourer quelques-unes des spécialités qui ont fait le renom du pays et notamment :

  • le foie gras
  • le confit de canard du Périgord
  • l’omelette aux truffes noires
  • la salade périgourdine
  • les fraises et les noix du Périgord
  • les pommes sarladaises à base de pommes de terre cuisinées dans de la graisse d’oie, de l’ail et du persil. Elles accompagnent à merveille les confits de canards !
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