Jêune de Tisha BeAv

Le mur des lamentations - ©Denis Doukhan CC0 Creative Commons

Tisha BeAv est évocateur pour les juifs orthodoxes. En revanche, nous Français ne connaissons pas toujours les pratiques liées à ce rite. En Terre Sainte, la tradition veut que chaque juif fasse une introspection approfondie.

Tisha BeAv est le jour le plus triste du calendrier hébraïque. Comme son nom l’indique Be Av est le neuvième jour du mois Av qui correspond à la mi-Août chez nous, qui notons les dates sur le calendrier grégorien.

L’origine de cette tradition

Durant le VI ème siècle avant l’ère courante, les premières apparitions de l’origine de cette tradition sont inscrites dans un livre de la bible hébraïque nommé le Livre de Zacharie. Zacharie étant un prophète, composa lui-même ce manuscrit dans lequel sont inscrits les commandements concernant les quatre jeûnes prophétiques. Tisha BeAv étant le plus strict de tous, du fait des événements qu’il commémore, chacun des jeûnes est destiné à la commémoration d’un évènement lié à la défaite de Jérusalem en 586 av. J.-C. et de l’exil d’Israël.

Le mont du temple est le lieu le plus béni, chéri et adoré du peuple juif. Sur ce mont-ci fut bâti le Second Temple rempli de trésors cachés à l’image du Premier – détruit une première fois par les Babyloniens – aussi connu sous le nom de Temple de Zorobadel, il fut construit soixante-dix ans après, sur l’ordre de Cyrus le Grand, le fondateur de l’Empire perse en 533 Av J.-C.

En l’an 66 après Jésus Christ, le peuple se rebella contre l’empire romain. Ce qui fut une mauvaise idée car quatre années plus tard en 70, Titus empereur Romain ordonna à ses troupes de conquérir le royaume de Jérusalem. Cette domination se fait plus lourde que celle sous Jules César, empereur bienveillant. C’est ainsi qu’il fut détruit, le Second Temple fut touché par les exterminations et des bombardements de pierres. C’est un moment douloureux pour le peuple hébreu. Aujourd’hui encore quelques pierres de soutènement (ouest) sont restées debout, les autorités juives ordonnent de les laisser en place. De plus, deux inscriptions grecques ont été découvertes, celles-ci expriment l’interdiction aux étrangers de pénétrer dans le Temple. Selon la communauté Chrétienne, ont y trouverait même les empruntes laissées de Jésus lors de son envole vers les cieux.

Le second Temple est celui qui est connu de Jésus de Nazareth, il y avait prêché et y aurait été ressuscité. Depuis ce moment de défaite, il ne peut qu’en découler de la tristesse chez les juifs du monde entier. Le pays s’en souvient, les séfarades le savent, les ashkénazes, jeunes juifs et plus anciens commémorent d’autant plus cet événement fatidique.

De nos jours, les émotions sont fortes notamment chez les orthodoxes de Jérusalem ouest lors de cette fête ou plutôt, lors de ce jour d’affliction publique. Jour de deuil et jour d’espoir, c’est un jour chômé dans le culte religieux ; les lois concernant l’affliction sont de mises. Toutes activités notées comme agréables sont bannies lors de la nuit et de la journée du 9 av – du coucher du soleil la veille au soir, jusqu’à la tombée de la nuit au lendemain. Un jeûne hydrique est totalement respecté sauf exceptions*, les plus frêles n’ont quant- à eux pas le droit de déguster ne serait-ce qu’une douceur, si le rabbin leur a interdit de pratiquer le jeûne. Ceux qui voulaient faire une cure détox dont les bienfaits du jeûne sont communément rapportés, sont des biens-heureux. Aucune offrande n’est acceptée, porter des chaussures et vêtements de cuir ne sont pas admis, ni même les lotions pour le corps ou quelconques produits chimiques. Cadeaux, sorties ou vêtements de fête ne sont pas du tout appropriés au risque de recevoir des regards noirs. Subséquemment, la tradition veut que personne ne puisse s’assoir convenablement à hauteur confortable et toute forme d’intimité conjugale est chassée. Se baigner ou se laver n’est pas non plus commode tout comme ne l’est pas la lecture de la Torah, car les commandements divins sont « bien trop réjouissants ». En somme les relations sociales ne sont pas les bienvenues en s’abstenant de saluer autrui ou bavarder. Ainsi le deuil respecté, la joie est la récompense de tous ceux qui s’y sont tenus.

Toutes ces mitsva … Mais alors que fait-on de cette journée ?

Dans un premier temps, l’après-midi notant la veille de Tich’a BeAv, le peuple de Judée prend un repas copieux aux saveurs barbaques afin d’être suffisamment rassasié pour le jeûne du jour de deuil. Quelques temps avant le coucher du soleil, vers la fin d’après-midi, il est de coutume de prendre un en-cas pour être sûr que le jeûne du lendemain ne soit pas désagréable à l’estomac. Cette pratique se nomme Seoudah Hamafseket, composé souvent de pain, d’eau et d’œuf dur. Cette nourriture devrait être trempée dans de la cendre en signe de deuil, pris en solitaire, assis sans chaise à terre de manière endeuillée.

Le jour de Ticha, des bougies sont allumées – notamment dans les synagogues, là où le Chantre dirige la prière à voix basse et sur un ton mélancolique. Des offices ont lieux le soir et le matin, toute la communauté juive s’y rend munie d’un talith (type de châle à quatre coins propres à la religion du judaïsme), car de toute façon, les villes sont mortes.

Chez soi, on lit. On récite le livre de Eikha, les Lamentations, les complaintes poétiques de Jérémie portant sur la destruction de Jérusalem et du premier temple. Les synagogues de chaque ville sont remplies durant ce jour de pénitence, rabbins, rav et pratiquants se rejoignent à l’aube pour retrouver le saint des saints pour un moment liturgique.
En effet, ce jour ne marque pas les esprits pour une joie limpide mais note bien son moment de deuil.

Malheureusement d’autres bouleversements se sont produits pour les juifs lors du 9 av. La sainte terre n’apprécie pas les moments de souvenir calamiteux en conséquence de pratique aux ondes basses, tristes, négatives.

Des centaines de milliers de juifs sont massacrés par les Romains à la même époque. Mais entre autres, en 1095 lorsque le pape Urbain II déclara son départ pour la première croisade des dizaines de milliers d’Israéliens sont tués, l’inquisition espagnole culmine avec l’expulsion des juifs d’Espagne le 9 Av 1492. La Première Guerre Mondiale éclate au jour de Tichea BeAv en 1914 alors que la Russie déclare la guerre à l’Allemagne, puis après ces faits la rancœur des Allemands contre les juifs fait suite à cette guerre posant les bases de l’holocauste, l’extermination aux aspects infinis du peuple judaïque. C’est également à cette date, Tichea BeAv, lors de laquelle les prémices de la déportation des juifs du ghetto de Varsovie ont lieu.

Quand est-il fêté?

Le jour le plus triste de l’année tombe malheureusement en plein mois estival, il paraitrait même que lors de cette période, la mer est déchainée à tel point que les juifs ont l’habitude de ne pas s’exposer devant celle-ci au mois d’Août. Une période bien tranquille aux ambiances glaciales malgré la chaleur prépondérante du pays, le mois suivant remonte la note de la fin d’été, c’est bientôt la fête de la nouvelle année civile qui sera grandement festive. Mais pas de panique ! L’été est long en Israël et se termine fin octobre pour le bonheur des baigneurs !

Tisha BeAv est prévu aux dates suivantes :

  • En 2019 : le dimanche 11 août 2019 (En France, début le samedi 10 aout à 21:17 et fin le dimanche 11 aout à 22:01)
  • En 2020 : le jeudi 30 juillet 2020 (En France, début le mercredi 29 juillet à 21:35 et fin le jeudi 30 juillet à 22:18)

*si Tichea BeAv tombe le jour de Chabbat, le jeûne est reporté au samedi soir jusqu’à dimanche. Mais le Shabbat n’est pas fêté aussi convivialement qu’il le devrait. De plus, même les femmes enceintes doivent jeûner, seules les femmes Israéliennes qui ont accouchés dans les 30 derniers jours passés ont le choix de refus.

Quand commence le jeûne de tichea beav ?

Le jeûne de Ticha BeAv commence la veille au soir, au coucher du soleil. Il dure pendant toute la nuit et se prolonge pendant toute la journée du 9 Av. Ce jeûne se termine lorsqu’il fait de nouveau nuit. Ce jeûne est complet, c’est-à-dire qu’il est interdit de consommer toute boisson ou toute nourriture. De plus, d'autres restrictions sont imposées aux fidèles endeuillés au cours des sept premiers jours de leur deuil.

Pourquoi tichea be av ?

Tichea Beav a été institué par les prophètes dans le but de pleurer la chute du premier Temple de Jérusalem. Ce jour permet de commémorer également toute une série de calamités nationales pour le peuple judéen puis juif. Parmi elles, on peut citer la destruction du second Temple de Jérusalem, les persécutions des Juifs au cours des croisades, l’expulsion des Juifs d’Espagne mais aussi l’extermination des Juifs qui a eu lieu pendant la Seconde Guerre Mondiale. Il s’agit du jour le plus triste du calendrier hébraïque. Ainsi, le 9 Av est précédé par trois semaines pendant lesquelles on interdit peu à peu la consommation de viande, de vin, l’écoute de musique ainsi que d’autres marques de réjouissance. Le rite principal rattaché à cette fête est le jeûne qui commence à la tombée de la nuit pour se terminer le lendemain au retour de la nuit. La tradition juive rappelle cependant que, six jours après le 9 Av, a lieu la fête de Tou Beav qui constituait l’une des journées les plus joyeuses de l'année juive à l’époque des Temples de Jérusalem. De plus, elle affirme que le 9 Av se transformera en jour de fête lorsque le messie sera venu.